Ce site rassemble de nombreux éléments concernant l’histoire des RASPAUD à travers les siècles

Les Raspaud, de la Provence vers Toulouse … et le comté de Foix

Le premier chapitre de cette page se déroule au début du XIIIe siècle, durant la croisade des Albigeois, et met en scène Raymond VII, comte de Toulouse, également connu sous le nom de Raymond le Jeune.

Information du lecteur : L’ensemble du contenu du site « raspaud.com » est basé sur des faits, des dates et des personnages historiques avérés. Seul le chapitre 1 – De Beaucaire à Toulouse – constitue une œuvre de fiction historique. Le contexte historique est réel, mais certains personnages sont fictifs, tout en demeurant plausibles et cohérents avec les éléments historiques.

1 – De Beaucaire à Toulouse

– Adossé aux remparts de Beaucaire, ville qui l’a vu naître dix-neuf années plus tôt, le jeune comte de Toulouse1 est pensif. Il vient d’ôter cotte de mailles et casque ; sa longue chevelure blonde ondule sous la brise légère dans une atmosphère encore chargée de la poussière soulevée par les combats de la nuit. Il a passé de trop longues heures à hurler ses ordres aux lieutenants qui l’entouraient ; sa gorge est irritée et ses oreilles bourdonnent encore du vacarme de la bataille. Il cherche à deviner sur l’autre rive du Rhône les clochers de Tarascon, mais les rayons du soleil qui percent à travers la brume matinale éblouissent ses yeux fatigués. Brusquement, les cloches du couvent des Cordeliers annonçant les laudes interrompent ses rêveries ; il se doit d’informer sans tarder son père des derniers événements.
Les orages qui pendant plusieurs jours ont déchiré le ciel de Provence ont rafraichi l’atmosphère et permettent enfin de mieux supporter la chaleur étouffante de ce mois de mai de l’an de grâce 1216 ; les pluies ont transformé les chemins en bourbiers, gonflé les ruisseaux et fait déborder le Gardon. Tout cela a retardé l’arrivée d’une partie des troupes du comte massée sur l’autre rive du Rhône, près d’Avignon et de Tarascon ; mais avant-hier, le mistral a nettoyé le ciel, la pluie a cessé, le Gardon est rentré dans son lit et l’armée de Raymond VII enfin rassemblée, a pu montrer sa force ; la victoire est là, et ce matin Raymond le jeune ne dissimule pas sa fierté ; la bataille fut acharnée, mais il a vaincu les troupes de Simon de Monfort ; il est entré ce matin dans les rues de Beaucaire pavoisées à ses couleurs, sous les acclamations d’une foule qui ne cachait pas sa joie. Lambert-de-Thury qui commandait la garnison ennemie a été contraint de se réfugier dans le château ; sa reddition est inéluctable : il est coupé des approvisionnements extérieurs et lorsque ses réserves de nourriture seront épuisées, il faudra bien qu’il se rende.
En effet, trois mois plus tard, le 24 août, Simon de Monfort se résoudra à abandonner définitivement Beaucaire ; ce sera sa première grande défaite qui précèdera sa mort deux ans plus tard et conduira en 1229 à la fin de la croisade des albigeois.

-Sans plus attendre, le jeune comte fait mander un de ses compagnons d’armes pour porter l’heureuse nouvelle à son père. C’est Géraud qui est désigné pour cette mission. Depuis quatorze mois, Géraud Raspaud et son frère aîné Hugues servent sous les ordres de Raymond VII qu’ils connaissent bien. Géraud et Raymond, qui ont le même âge, ont le même maître d’armes et depuis cinq ans, s’entraînent ensemble près de Bonnieux, chaque fois que Raymond est en ses terres de Provence.
-Le choix de Géraud n’est pas le fruit du hasard : il était convenu depuis plusieurs semaines, qu’il rejoindrait Toulouse à la demande du comte. Sur sa route il aura l’occasion d’informer le vieux comte Raymond VI de la victoire qui vient d’être acquise. Ce dernier se trouve actuellement à Narbonne, sur le chemin de l’Aragon où il va lever une armée pour reconquérir ses possessions. En effet, malgré la reconnaissance de son titre de margrave de Provence par le pape Innocent III au concile de Latran en novembre dernier, Simon de Montfort persiste dans son refus de lui rendre ses terres.
– Comme son frère, Hugues ne retournera pas non plus à Bonnieux ; il vient d’épouser à Sisteron, Antoinette de Carniol fille unique du vieux seigneur de Sigoyers, et ce dernier lui a demandé de prendre en charge ses domaines.
Leurs engagements sous la bannière du comte avaient contraint les deux frères à laisser leur père exploiter seul la fabrique de draps familiale à Bonnieux, située à une quinzaine de lieues de Beaucaire. Si ce commerce avait autrefois prospéré, enrichissant considérablement les Raspaud, il connaît un fort ralentissement depuis huit ans. La guerre des seigneurs du nord, menée à la demande du pape Innocent III et avec l’aval du roi Philippe-Auguste, a en effet conduit à une raréfaction du lin nécessaire à la fabrication des draps. Les troupes du nord, dans leur stratégie de destruction, incendient systématiquement les champs à l’approche des moissons.
– Géraud, bien que fier de servir son comte, ressent un pincement au cœur. Il doit quitter la Provence terre de ses ancêtres, où sa famille a adopté depuis plusieurs générations le nom de ses terres, le domaine de la Raspaude. Cette habitude concernant le nom de famille remonte à plus d’un siècle, lorsque les familles de Provence, du comté de Toulouse, de Lombardie et de Toscane ont adopté l’usage de transmettre le même nom à tous leurs membres. Ainsi, le nom de famille « Raspaud », adopté par son grand-père, a été transmis par son père, son frère, et lui-même, assurant ainsi la pérennité de cette lignée familiale.
L’histoire raconte que le domaine de la Raspaude doit son nom à un chef wisigoth nommé « Raspwald », qui défricha ces terres lors de leur invasion au Ve siècle .
– Hugues serre son frère dans ses bras, réalisant avec tristesse que c’était peut-être la dernière fois qu’ils se voyaient. C’était lui, l’aîné, qui l’avait convaincu, au début de l’année dernière, de rejoindre Raymond le jeune. Et maintenant, leurs chemins se séparent. Plus de cent lieues les sépareront bientôt. Géraud va s’installer définitivement à Toulouse, où il mettra son énergie au service de la fabrication d’armes. L’armée du comte en avait un grand besoin et Géraud était fier de pouvoir contribuer aux luttes que menait le comte pour la reconnaissance de ses droits.
– Géraud accompagné d’un autre miles2, Pons d’Avignon, qui a déjà fait plusieurs fois la route jusqu’à Toulouse, s’engage dans la direction de Nîmes où il couchera ce soir avant d’atteindre Narbonne deux jours plus tard … si tout se passe bien.
C’est au grand galop qu’avec son compagnon ils franchissent les six lieues qui les séparent de Nîmes. Après avoir effectué une halte rapide à Narbonne où Géraud a pu annoncer au vieux comte que la victoire de Beaucaire avait été difficile à obtenir, mais que les troupes de Simon de Monfort avaient été écrasées, les deux compagnons poursuivent leur voyage vers Carcassonne. Enfin, le sixième jour, depuis les collines de Saint-Orens, Géraud découvre au loin Toulouse, cette ville dont son père lui a si souvent parlé, et dont on lui a dit qu’elle était alors la troisième du monde chrétien après Rome et Venise.3. Il n’a jamais été dans une cité d’une telle dimension et il est pris d’un vertige à l’idée d’habiter cette ville. Géraud et Pons sont à présent dans les faubourgs de Toulouse ; ils passent devant le château narbonnais, résidence des comtes de Toulouse, occupé depuis la fin de l’année dernière par Simon de Monfort, le chef de cette drôle de guerre que l’on appelle « croisade des Albigeois ».
– Géraud pénètre dans la demeure mise à sa disposition par Raymond le jeune, dans le quartier du Pont Vieux. L’émotion le gagne en découvrant son nouveau chez-lui, l’environnement de ce qui sera sa nouvelle vie. Ce soir, il prévoit de rendre visite à Vital de Puybusque, une relation de son père qu’il a rencontré à Bonnieux l’année dernière. Vital est un important fabricant de draps de Toulouse, tout comme le père de Géraud. Les deux familles sont liées par des relations commerciales depuis de nombreuses années, leurs fabriques de Bonnieux et de Toulouse travaillant parfois en collaboration.
– Dès demain, Géraud rencontrera Sicard Garaud, un influent marchand de Toulouse dont la réputation dans le commerce du fer et la fabrication d’armes n’est plus à faire. Cette rencontre, organisée à la demande du comte, marquera le début de leur association.
– La semaine prochaine, Géraud et Sicard se rendront dans le comté de Foix afin d’acquérir le fer nécessaire à la fabrication des armes pour l’armée du comte. Ces armes sont indispensables au comte, car cette guerre contre les seigneurs du nord se poursuivra encore pendant 29 ans. En effet, malgré le traité de Meaux-Paris de 1229 qui prévoit le mariage de la fille unique de Raymond VII, Jeanne, avec le frère de celui qui deviendra Louis IX (Saint-Louis), traité qui met fin à la croisade des albigeois, les conflits entre le comté de Toulouse, la papauté et le roi de France ne prendront fin qu’en 1245. La mort de Raymond VII en 1249 entraînera l’annexion du comté de Toulouse, cinq fois plus étendu que le domaine royal de France, à ce dernier, consolidant ainsi le pouvoir royal et agrandissant considérablement les possessions personnelles du roi.
– Sans le savoir Géraud est sur le point de croiser le chemin de personnes qui changeront profondément sa vie. La famille qu’il fondera trois ans plus tard s’unira à celles de ses nouvelles connaissances, et cette alliance perdurera durant près de deux siècles, à travers neuf générations. Soixante ans plus tard l’une de ses petites-filles épousera un Garaud et l’arrière-petit-fils de son arrière-petit-fils épousera encore une descendante de Sicard Garaud… et le fils de ce dernier épousera une Puybusque. 

2 – Le commerce du fer

Au milieu du XIVe siècle, les Raspaud sont désormais bien établis à Toulouse. Un siècle et demi s’est écoulé depuis leur arrivée et ils font partie des notables de la ville. La grande peste de 1348, qui avait décimé un tiers de la population toulousaine, est désormais un souvenir douloureux, mais la crainte d’une nouvelle épidémie persiste. Les compagnies anglaises, qui avaient semé le chaos dans les campagnes pendant des années, ont finalement été chassées, et la fin du siècle apporte avec elle une véritable renaissance économique. Les foires et marchés sont de nouveau florissants et les marchands voient leurs affaires prospérer. Guilhem Raspaud est né vers 1370 à Toulouse. Vingt-cinq ans plus tard, son père étant probablement décédé, sa fortune est conséquente. Les affaires qu’il dirige sont nombreuses et extrêmement prospères ; il est changeur4 mais fait aussi commerce de diverses denrées. Pour ses affaires au-delà de Toulouse, Géraud, comme la plupart des négociants de la ville, s’appuie sur les comptoirs de change. En plus de celui qu’il détient à Toulouse, il entretient des relations commerciales avec un comptoir à Pamiers et un autre situé plus haut dans la vallée de l’Ariège, à Tarascon. Entre 1390 et 1420, il fait de très nombreux voyages entre Toulouse et le comté de Foix. Les routes ne sont pas sûres, mais grâce aux comptoirs de change il obtient facilement les sommes lui permettant de payer le fer qu’il achète dans le comté de Foix, et cela sans avoir à transporter depuis Toulouse des sommes conséquentes sur lui. En outre, pour mieux rentabiliser ses déplacements, lorsqu’il le peut, il part de Toulouse avec des marchandises qui seront ensuite revendues à Pamiers ou à Foix. À l’insécurité qui règne sur les routes, s’ajoutent les problèmes créés par les péages que le comte de Foix et les seigneurs locaux perçoivent sur les transports de marchandises. Un traité datant de 1222 entre la ville de Toulouse et le comté de Foix prévoit pourtant que les Toulousains seront exonérés de ces péages, mais les fermiers généraux du comte de Foix connaissent mal ce traité, ou font semblant de ne pas le connaître ; les discussions sont souvent fastidieuses et il est fréquent que l’on soit obligé de payer si l’on veut passer. En février 1393, Guilhem et les transporteurs qui sont à son service seront obligés de débourser deux sols tournois et demi au péage de Saverdun ; un autre marchand, Pierre Raymond Borrel qui voyage avec Guilhem entre Toulouse et le comté de Foix, paiera lui aussi ; toujours en février de cette même année, Guilhem paiera de nouveau quinze sols à Pamiers et treize livres à Foix. Le prix du passage une fois fixé, il faut s’acquitter de la somme due, soit en troquant quelques marchandises, soit en présentant de l’argent sonnant et trébuchant. Et pour cela il faut aller chercher les espèces nécessaires jusqu’à Pamiers ou Tarascon. De quoi grever le voyage de deux ou trois jours.. Ce sera le même problème en 1405 au péage de Pamiers. Mais cela ne gêne en rien la réussite financière de Guilhem qui, en 1398, est l’un des cinq plus gros changeurs de Toulouse et est l’un des deux principaux pourvoyeurs de fer de la ville. Il faut dire que depuis le début du XIVème, l’utilisation des moulines5 dans le comté de Foix a permis un développement exceptionnel du commerce du fer ce qui a décuplé la fortune des Raspaud.

3 – Guilhem Raspaud et Jean Garaud

En 1399, le jeune Guilhem unit son destin à celui de Bertrande, la fille de Pierre Garaud (Garaud ou Guiraud selon les actes), originaire du Rouergat. Ce dernier est peut-être le fils ou le neveu de la « veuve de Raymond Garaud » qui avait vendu vingt ans plus tôt son commerce de fer au père de Guilhem. L’année suivante, en 1400, naît Pierre Raymond Raspaud. Trente ans plus tard, alors que les liens commerciaux entre les Garaud et les Raspaud sont anciens, les deux familles vont maintenant se lier plus intimement. Jean Garaud qui a été capitoul en 1412, est coseigneur de Colomiers et de Pibrac ; il n’a qu’un enfant, une fille, Géraude. Guilhem n’a qu’un fils, Pierre Raymond. En 1430 le mariage entre les deux enfants uniques est célébré. Bien que la fortune de Guilhem soit conséquente, celle de Jean Garaud est plus importante encore. Mais plus que la fortune, c’est la position sociale des Garaud qui surpasse celle des Raspaud. Les Garaud sont nobles depuis cinq générations, le père le grand-père et l’arrière-grand-père de Jean ont été capitouls ; ils possèdent en outre de nombreux domaines autour de Toulouse. Dans le contrat de mariage établi entre Guilhem Raspaud et Jean Garaud, il est stipulé que Pierre Raymond sera héritier universel de son beau-père et héritera ainsi de la noblesse attachée aux Garaud ; le contrat prévoit aussi qu’il renonce à son nom, adopte le nom « Garaud » et qu’il en sera de même pour ses descendants. Pierre Raymond Raspaud devient ainsi Pierre Raymond Garaud. Dans les actes notariés, son fils Pierre sera dénommé Pierre Garaud alias Raspaud ou parfois Pierre Raspaud alias Garaud (!). Ce qui peut surprendre, c’est que les enfants de Pierre, alors que le grand-père Garaud est décédé depuis longtemps, reprendront le nom « Raspaud ». Mais il y a une explication à ce changement : En effet Pierre, le fils de Pierre Raymond, avait épousé le 3 septembre 1476 Peyronne de Puybusque. Or, lorsque Jean de Puybusque, grand-oncle de Peyrone, était gérant de la Trésorerie Royale de Toulouse en 1432, il avait la charge de l’entretien des fortifications de la ville ; en 1435 il avait été accusé d’avoir « détourné » des fonds. Détournement signifie mauvaise affectation des fonds ; effectivement, il avait utilisé une partie des fonds destinés à la réparation des fortifications, à un usage autre que celui qui avait été prévu, et cela, sans en informer préalablement l’ensemble des capitouls. Toute la famille Puybusque s’était sentie humiliée par cette accusation et Jean Garaud, le grand-père de Pierre, avait été l’un des accusateurs ; il était intolérable pour les Puybusque qu’un de leurs descendants porte le nom « Garaud » ce qui explique le retour au nom « Raspaud ».

4 – D’Azur au Lion d’Argent

Le couple Pierre et Peyronne va avoir cinq enfants, deux filles et trois garçons, et quatorze petits-enfants. Les trois fils de Pierre et Peyrone, Bertrand, Jean et Bernard vont entreprendre en 1530 la reconstruction du château des Raspaud à Colomiers. En effet la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons, qui avait ensanglanté la région au siècle précédent, avait laissé des cicatrices profondes, notamment sur le patrimoine des familles nobles.
– Pour traiter leurs affaires, les Raspaud résident désormais à Toulouse, rue des Polinaires, tout près de la rue de la Madeleine et de la rue des Paradoux où leur grand-père, Pierre Raymond, avait fait construire deux hôtels particuliers, chacun doté d’une tour capitulaire6. Leurs armoiries, « D’azur au lion d’argent », ornent désormais le fronton de leurs demeures toulousaines, de leur château de Colomiers et de l’église Sainte-Radegonde de Colomiers, où se trouve leur sépulture familiale.

D’Azur au lion d’Argent

Tous les enfants de Pierre s’uniront à des familles de notables de Toulouse. Jean va épouser Bertrande Ynard, fille d’Antoine Ynard, écuyer, et Bernard va épouser en premières noces Catherine de Bonvillar fille de Gaillard de Bonvillar, seigneur de Saussens, puis en secondes noces, après le décès de Catherine, Eudoulcie Maynard. Le troisième frère, Bertrand épousera Isabeau Doulce. Les Raspaud, nobles et coseigneurs de Colomiers, jouissent d’un privilège rare : partager la seigneurie de cette terre avec le roi de France, une marque de distinction au sein de l’aristocratie toulousaine. En effet, le 10 février 1318, le roi Philippe V le Long avait signé avec le coseigneur de l’époque, l’acte de paréage définissant que désormais les droits féodaux attachés à Colomiers sont indivis entre le roi et le coseigneur, la moitié pour le roi et l’autre moitié pour le coseigneur. Par des alliances avec les Robiane, les Rességuier, les Vinhes, les Hébrard, les Villeneuve et les Goyrans, les Raspaud assoient leur pouvoir auprès des familles les plus influentes de la ville ; Ils mettent en place une stratégie d’alliances dans le comté de Foix et dans toute la région toulousaine : ils s’allient avec les Usson proches du roi de Navarre, les Falga, les Bonvillar, les Comines, les de Nos, les du Faur, … Plusieurs petits-enfants de Pierre entreront dans les ordres religieux ; Arnaud sera bénédictin, Jérôme sera chanoine et archiprêtre, un autre Jérôme sera lui aussi chanoine et archiprêtre de cathédrale. Avant leur mariage, les filles sont fréquemment dans des couvents. D’autres petits-enfants de Pierre6 seront militaires comme Louis, au service du roi, ou Antoine au service de Toulouse. En 1562, lors du déclenchement des guerres de religions et alors que les protestants ont pris le pouvoir à Pamiers, le chanoine Jérôme Raspaud parvient à faire entrer les troupes catholiques dans la ville en ouvrant les portes du couvent des Augustins. Mais douze ans plus tard, en 1574, la ville de Pamiers est retombée entre les mains des protestants. En juin de cette même année, le frère de Jérôme, Antoine Raspaud (ou de Raspaud) qui est capitaine des troupes de Toulouse, reprend la ville aux protestants et le 20 juin il est nommé capitaine-viguier de Pamiers. En décembre de cette même année Antoine devient capitoul de Toulouse. Quelques années plus tard, il obtient que son second fils, Jérôme le jeune, succède à son oncle (qui porte les mêmes nom et prénom) comme archiprêtre, chanoine de cathédrale, puis archidiacre de Pamiers. Ce dernier va être chargé de la gestion d’une grande partie des biens de l’Eglise du diocèse.
-En 1582, Antoine de Raspaud, auréolé de ses récentes victoires sur les armées protestantes dans le Lauragais, notamment près de Castelnaudary et au nord de Castres, est au sommet de sa gloire. Son surnom de « Capitany », qui deviendra celui d’une métairie lui appartenant à Colomiers7, témoigne de son prestige. En septembre, Antoine unira son fils Jean-Jacques à Jeanne de Villeneuve, fille de Géraud de Villeneuve, descendant des barons de Villeneuve, une très ancienne famille liée aux comtes de Toulouse. Toute la noblesse du Lauragais assistera aux noces célébrées au château de la Croisille le 9 septembre 1582.
– Le plus jeune fils de Jean-Jacques, Jean-Gabriel sera reçu Chevalier de l’Ordre de Malte en 1608 ; en août 1615 il accompagnera le Chevalier de Vendôme8 à Malte pour participer à la défense de l’île contre les Turcs. Il occupera par la suite, une charge dans la commanderie de Gap (probablement Gap-Francès, sur le Mont Lozère).
– Au XVIIe siècle, la famille s’est élargie et les héritages, parfois compliqués, ont dispersé les Raspaud et leurs domaines. En 1634, Jeanne de Villeneuve, veuve de Jean-Jacques de Raspaud, son fils Jean-Gabriel de Raspaud et sa belle-fille, veuve de Marc-Antoine de Raspaud, vendent ensemble aux Rabastens une grande partie des parts qu’ils possèdent à Colomiers. En 1647, après la perte d’un procès contre leurs cousins les Goyrans, les Raspaud n’ont plus aucune part de Colomiers.

5 – Une branche ariègeoise10

(Une branche parmi beaucoup d’autres)

Le chapitre 7 « Les Raspaud autour de Pamiers … », détaille les principales raisons qui ont poussé les Raspaud à s’implanter en nombre autour de Pamiers. Cela a commencé avec Guilhem et son fils Pierre-Raymond, puis avec les deux chanoines Jérôme et Jérôme le jeune, puis Antoine, Françoise et Pierre. Pierre est le fils de Jean-Jacques de Raspaud et le petit-fils d’Antoine, le Capitany. Il va épouser près de Mirepoix, Jeanne-Marie d’Auriol, fille de Paul d’Auriol, chef de la milice de Mirepoix. Jeanne-Marie apporte par son mariage les terres et fiefs provenant de la famille d’Auriol à Castelnaudary, Gaja, Laurac, Labastide d’Anjou, Mas Saintes Puelles et Mireval. Pierre et Jeanne-Marie auront quatre filles, mais Jeanne-Marie décédera jeune. Pierre entretiendra alors une nouvelle relation qui donnera naissance, en 1645, à Jean11. Pierre donnera son nom à ce fils né trois ou quatre ans après le décès de son épouse, mais il cherchera surtout à « protéger » les futurs mariages de ses quatre filles issues de son union légitime. Celles-ci sont alors âgées, lors de la naissance de Jean, de dix ans pour la plus jeune et vingt ans pour l’ainée. Pierre décide tout naturellement que lors de son décès, seules ses filles hériteront. Cependant il est probable qu’il va transmettre de son vivant des biens importants à son fils Jean puisque ce dernier sera surnommé « Rié » ce qui signifie, en vieil occitan, « riche ». Jean a vingt-quatre ans lorsqu’il épouse, en mai 1669, Gabrielle Bugnas à La Bastide-de-Sérou. Ils auront quatre enfants qui seront tous dotés de terres lors de leur mariage12 ; viennent-elles directement de leur grand-père Pierre ? – Nous n’avons pas la réponse à cette question et nous n’avons pas retrouvé de trace de domaines appartenant à Pierre à proximité immédiate de La Bastide-de-Sérou. Cependant nous savons que les Raspaud de Colomiers étaient présents depuis longtemps à proximité de La Bastide de Sérou puisque Françoise de Raspaud est née vers 1575 au Mas d’Azil, à 9 kilomètres de La Bastide de Sérou. La possession de ces terres par les Raspaud remontait peut-être à plusieurs générations ? – L’un des enfants de Jean, Elie (ou Hélier), aura lui-même douze enfants dont neuf garçons qui vont « faire souche » dans l’Ariège. Elie est Maître charpentier de même que son fils Jean qui épouse le 25 février 1767 Marie Clarac, à Pamiers. Louis, le fils de ce dernier couple, possède lors de son décès le 14 janvier 1844, de très nombreuses terres, des bâtiments et une auberge à Loubens. Louis aura sept enfants et vingt-quatre petits-enfants. Plusieurs de ses enfants, qui sont tous installés à Loubens13, exploiteront les terres et les bois dont ils héritent. Les uns exploiteront les terres argileuses pour la fabrication de tuiles et briques, les autres exploiteront les terrains calcaires et les bois pour la fabrication de chaux. Tous les petits-enfants de Louis vont naître à Loubens. L’un de ses petits-enfants, qui porte aussi le prénom Louis, est chaufournier ; c’est le père de Pierre-dit-François né en 1882, à Loubens. Ce dernier aura lui-même deux fils Louis et Marcel nés au début du XXème siècle …….

  1. Le comte de Toulouse dont il est question ici est Raymond VII dit aussi Raymond le jeune. ↩︎
  2. Un « miles » est un chevalier ou un militaire. (Il est dans le métier des armes.) ↩︎
  3. Toulouse avait alors une population de près de 25000 habitants, comparable à celle de Paris. A la même époque Lyon avait moins de 10000 habitants, Marseille moins de 20000 et Bordeaux ne deviendra véritablement une ville qu’à la fin du XIIIème siècle. ↩︎
  4. Changeur, c’est-à-dire banquier. ↩︎
  5. La mouline est une forge hydraulique de réduction directe utilisée pour la fabrication du fer à partir du minerai. Cette technique innovante a bouleversé, au début du XIVème siècle, les conditions traditionnelles de production du fer et a permis autour des mines de Vicdessos (dans les montagnes du comté de Foix) le développement extrêmement rapide d’une production assurant largement les besoins régionaux et au-delà. ↩︎
  6. Les capitouls jouissaient du privilège de pouvoir ériger, dans leurs hôtels particuliers, une tour qui dominait la ville. ↩︎
  7. Les détails concernant la généalogie, peuvent être consultés dans le chapitre « Un site de généalogie ». ↩︎
  8. Au XXIe siècle le domaine de cette ancienne métairie est maintenant occupé par les usines de construction d’Airbus et le nom « Capitany » a été donné à un ensemble sportif de la ville de Colomiers. ↩︎
  9. Alexandre de Vendôme dit « le chevalier de Vendôme » était le fils illégitime d’Henri IV et Gabrielle d’Estrées ↩︎
  10. Voir aussi le chapitre « Les Raspaud autour de Pamiers » ↩︎
  11. L’acte de baptême de Jean, n’a pas pu être retrouvé. En effet, les registres d’actes de baptême de l’Ariège et de l’Aude avant 1650 présentent de nombreuses lacunes rendant la recherche difficile. Ainsi, la filiation de Jean reste hypothétique et doit encore être confirmée. Cette hypothèse a été formulée par un généalogiste professionnel qui, en se basant sur un raisonnement logique, a conclu que Pierre était le seul Raspaud pouvant être le père de Jean, dans un périmètre de plus de 50 km. Cette hypothèse pourrait être remise en question suite à la découverte de nouveaux documents, notamment des documents concernant les descendants des oncles, neveux et cousins des deux Jérôme Raspaud. Il est à noter que ces descendants sont très nombreux dès le XVIème siècle dans la région de Pamiers, la Bastide de Sérou et le Mas d’Azil. ↩︎
  12. Le surnom « Rié » sera porté par deux de ses fils et au moins l’un de ses 25 petits-enfants. ↩︎
  13. Loubens est situé à 5 kilomètres à vol d’oiseau de Pamiers. ↩︎